Jean-François Mattéi (1941-2014)

mardi 25 mars 2014

L’annonce de son décès lundi 24 mars a fait sur nous tous l’effet d’une bombe. Nous étions loin de nous attendre à une si triste nouvelle. Il venait, à tout juste 73 ans, de publier son dernier ouvrage sur Camus et nous espérions bien qu’il viendrait nous le dédicacer à la prochaine réunion d’Alysgo-Apollo en septembre prochain à Montpellier. C’est pour tous les amis qui l’ont connu, pour les Algérianistes ainsi que pour le monde intellectuel une grande perte.Nous présentons à Anne, son épouse , à Philippe, Alexandre, Isabelle, ses enfants et à toute sa famille nos condoléances attristées

Je ne retracerai pas ici la vie de Jean-François Mattéi, bien connue par ailleurs.

Je voudrais seulement rappeler le bon camarade qu’il a été pendant toute sa scolarité au Lycée Lamoricière où nous avons été condisciples de la 4 ème à la classe de Lettres Supérieures. Quand je l’ai connu, il était un peu espiègle et taquin, mais toujours bon esprit, serviable et avait un grand sens de l’amitié. A mesure qu’il avançait en âge, tous ses copains reconnaissaient son sérieux. Il était estimé de ses professeurs, je pense en particulier à l’un de ceux qui nous a le plus marqués, Yves Coirault, professeur de Lettres Classiques qui nous a donné le goût de la langue et de la pensée grecques.

Jean-François s’éveilla à la philosophie avec Yves Vié-le-Sage, mais surtout, en Lettres Supérieures, grâce à Jean Cohen. Cet éminent professeur de philo avait plus d’une corde à son arc. Je me souviens qu’avec André Pomet, ancien instituteur de l’Ecole des Falaises et pianiste, il nous donnait rendez-vous rue de la Paix à la Librairie Fouque le samedi après-midi : avec Paul Fouque et André Pomet, Jean Cohen improvisait alors dans l’auditorium des conférences sur les musiciens de toutes les époques et nous faisait écouter des extraits de leurs principales oeuvres. Jean-François n’aurait manqué pour rien au monde l’une de ces séances. Il était ouvert à tous les genres. C’est lui qui me fit connaître la coqueluche des Oranais, Ray Conniff, mais aussi le superbe concerto de Varsovie d’Addinsell. C’était aussi un passionné de cinéma qui fréquentait assidûment, entre autres, le "Century" non loin de chez lui.
Je lui ai toujours connu un grand intérêt pour Camus. Je revois encore sur son visage son émotion lorsque ce mardi 5 janvier 1960, nous entrâmes dans notre salle de Lettres Supérieures, cour Martin. Notre professeur de Lettres, Georges Devallet, ne nous laissa pas le temps de nous asseoir et s’adressa à nous dans des termes que je n’oublierai jamais :"Mesdemoiselles, Messieurs, je vous demanderai de bien vouloir respecter une minute de silence : un grand homme, un compatriote algérien vient de nous quitter dans un stupide accident : Albert Camus est mort hier".

Mon cher Jean-François, 54 ans après, nous ressentons à l’annonce de ton décès, la même émotion et la même tristesse que toi ce 5 janvier 1960. Tu nous as quittés. Tu faisais partie d’une jeunesse à jamais perdue dans un pays que nous avons tant aimé. Nous avions été heureux de te revoir à Arles en 2009. Nous aurions espéré te compter plus souvent parmi nous avec ton épouse Anne que nous connaissions bien aussi - puisqu’elle fut élève de Lettres Supérieures en 1960 à Lamoricière -, mais nous savions que tu étais pris par toutes tes occupations et nous te pardonnions bien volontiers tes absences.

Dans l’Etat de Siège, Camus, qui t’était si familier, faisait dire à Diego par Victoria : "C’est un affreux tourment de mourir en sachant qu’on sera oubliée". Rassure-toi, là où tu es aujourd’hui, nous ne t’oublierons pas.

Jean-Paul FERNON (25 mars 2014).


Commentaires

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mercredi 26 mars 2014 à 12h08 - par  Jean-paul VICTORY

Nous avions ensemble fréquenté la classe de philosophie de M.Yves Vié le sage en 1958-1959.
Je ne le connaissais pas beaucoup car autant que je m’en souvienne Jean-François était très réservé et discret du moins à cette époque.
J’ai suivi comme tous mes camarades l’exceptionnel parcours de notre ami et c’est avec beaucoup de plaisir que nous l’avons revu à Arles, à Toulouse pour une conférence sur Albert CAMUS dont il était un grand spécialiste, à Masseube (Gers) et parfois même à la télévision.
J’ai lu quelques-uns de ses ouvrages argumentés et pédagogiques (on sentait le professeur et son souci de clarté) et sur de grands journaux quelques uns de ses articles toujours merveilleusement écrits.
A nos nombreuses invitations (rassemblement national ALYSGO-APOLLO) il n’a pas toujours pu répondre favorablement .
Je me souviens qu’il avait pris le temps de s’en excuser en m’adressant une lettre tout à fait amicale et chaleureuse.
Encore cette année nous espérions le retrouver à notre rassemblement de Montpellier en septembre prochain.
Nous perdons un ami et un défenseur de nos valeurs.
Je voudrais ajouter que nous pensons beaucoup à son épouse, ses enfants et petits-enfants.
JPV

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mardi 25 mars 2014 à 20h45 - par  JPF

Quelques réactions arrivées par mails :

* JPaul Taddéi : Triste nouvelle. J’ai connu JF Mattei à Bastia et nous sommes restés ensemble pendant deux jours.Nous avons été surpris de nos coincidences, lycée Lamoricière,etc...
J’avais son adresse mail et nous nous écrivions de temps en temps.
C’était un défenseur de notre culture pied-noire et Chrétienne

* Alain Praly : K.O.c’est que je ressens avec un grand étonnement et une grande tristesse !!!

* Robert Davezac (membre du CEFANOM de Toulouse et Algérianiste) :C’est avec une profonde tristesse que nous apprenons le décès de Jean-François Mattéi.
Les Algérianistes sont en deuil. Nous adressons nos sincères condoléances à sa famille et à ses proches
Algérianiste de toujours, Jean-François Mattéi était également un spécialiste d’Albert Camus, de renommée mondiale.
Il a largement œuvré pour la réhabilitation de l’image de Camus parmi les Français d’Algérie et même au-delà.

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mardi 25 mars 2014 à 18h47 - par  Renée Ivanès

Contrairement à d’autres "potaches" du Lycée Lamoricière que je connais mal, nous avions longuement bavardé, échangé, ri...
Sa culture n’avait d’équivalent que sa gentillesse naturelle, le tout enveloppé d’un "savoir dire et savoir écouter" sans pareil
Sur le Chemin du Ciel, sûr qu’il a dû donner quelques leçons de lettres Françaises, de celles qui écrivent en bleu blanc rouge l’Histoire de notre chère Oran.. et que, de là haut Jean-François regarde, avec ce sourire doux et moqueur à la fois ,ses amis qui penseront toujours à lui.

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